Quand on comprend que la question n’est pas si mais quand cela va avoir lieu ?
4ème lettre ou quand la prise de conscience des dirigeant.e.s retourne les contraintes en opportunités.
Par des temps incertains, les marchés boursiers se tournent vers des valeurs refuges comme l’or. Notre époque incertaine n’échappe pas à la règle. Les banques centrales stockent autant qu’elles peuvent, ce qui a fait grimper le cours de l’or de 25% cette année. Pourtant dans le même temps, l’extraction de l’or va atteindre un nouveau pic en cette année 2025 avec 3 250 tonnes extraites, pour un bon tiers en Chine, Russie, Australie, Canada ou aux USA.
Une activité toujours aussi controversée mais qui connait un redémarrage
Néanmoins, là aussi, le potentiel d’extraction va diminuer, les analystes prévoient une baisse annuelle allant jusqu’à 17% en 2030. Les gisements les plus accessibles s’avèrent de moins en moins faciles à exploiter. Les limites se font sentir mais, bien évidemment, on continue de creuser partout où c’est possible : les projets d’explorations se sont multipliés cette année.
L’extraction d’or est pourtant une des activités les plus dévastatrices des écosystèmes au niveau mondial. Chaque année, un milliard de tonnes de terres sont « traitées » au cyanure pour permettre d’extraire ce précieux métal. Lorsque ce n’est pas du cyanure, c’est du mercure qui est utilisé. Ajouté à cela les impacts sur l’eau, les mafias et cartels qui fleurissent sur ces activités. Et non la technologie ne parvient pas à réduire correctement les ravages provoqués : on part de bien trop loin.
L’occasion de partager aussi une photo de l’excellent photographe brésilien Sebastião Salgado dans une mine d’or dans les années 80.
Quand le risque est avéré, oser retourner les contraintes en opportunités
Si l’on ajoute à cela, des tensions diplomatiques fortes, des augmentations des coûts de l’énergie et aussi une concurrence entre les usages de l’or (oui il y en a dans nos smartphones par exemple). On se doute que dépendre de l’or n’est pas une bonne nouvelle pour beaucoup d’entreprises.
C’est dans ce contexte qu’en juillet dernier, l’entreprise d’horlogerie et de bijouterie Maty a annoncé qu’elle n’utilisera plus que de l’or « recyclé » à 100% d’ici la fin de l’année 2025. L’entreprise française n’est pas la seule, elle suit une tendance initiée depuis une dizaine d’années par de nombreuses maisons de luxe.
Bien sûr, vous pouvez y voir une action de greenwashing dans un domaine peu utile pour la société dans son ensemble, et je vous dirai que je suis bien d’accord avec vous. Je préfère m’attarder aujourd’hui sur la dimension adaptabilité de la démarche.
Aujourd’hui, de nombreuses entreprises sont à risques sur leur approvisionnement de matières clés mais quasiment rien ne se passe, trop peu de choses sont anticipées. Il en va pourtant de la survie de ces entreprises dans les années à venir.
Les ravages du business as usual alors que le risque devient certitude
On l’a bien constaté avec les boulangers suite au déclenchement de la guerre en Ukraine, le cours du blé a bondi, de même pour leur énergie. Mis à part demander aux clients un peu de compréhension en acceptant l’augmentation des produits finis. Peu d’initiatives ont été prises au niveau national, si ce n’est la création de beaucoup de regroupements de boulangeries pour avoir des économies d’échelles les plus fortes possibles.
Dans la plupart des domaines, la question n’est plus de savoir si cela va arriver mais quand cela va arriver. Depuis des décennies, les rapports, recherches et analyses défilent. Un peu comme notre rétine qui s’est habituée à slalomer entre les encarts publicitaires, notre esprit s’est habitué à vivre avec ces messages.
Leur prise en compte reste superficielle, à moins que le danger soit immédiat. Nous restons la tête dans le guidon sans véritablement réaliser que ces prévisions finissent par devenir réalité et que le business as usual n’aura bientôt plus de sens.
Oser voir plus loin que juste son fournisseur direct
Pendant un atelier chez une filiale d’un grand industriel français, nous avions invité le fournisseur d’acier à participer. C’est quand celui-ci a fait part de toutes ces difficultés depuis la guerre en Ukraine que les équipes ont compris les tensions auxquelles il faisait face. Sans prendre les devants, leur entreprise ne pourrait plus rien produire dans les années à venir. Mais que faire pour éviter pareille situation ?
D’abord, je vous invite à vous concentrer sur la matière en soi. Prenez le temps de répondre à ces quelques questions :
Qu’en est-il des capacités d’approvisionnements dans les années à venir ?
Quelles dynamiques ou évènements pourraient impacter cet approvisionnement clé ?
Existe-t-il des alternatives à cette matière ?
Quels avantages et inconvénients présentent ces alternatives par rapport à la solution actuelle ?
Ces alternatives d’approvisionnement seront-elles plus pertinentes à moyen ou long terme ?
“Leaders take all” : les 1ers à se transformer sont souvent les 1ers à saisir les opportunités à venir
Si les réponses à ces premières questions ne sont pas satisfaisantes. Je vous invite à aller plus loin et en regardant aussi votre modèle économique. Maty a changé son approvisionnement pour l’or mais l’entreprise a aussi racheté Cresus, une entreprise spécialisée dans l’achat et revente de montres d’occasion en 2024.
Je ne vous incite pas nécessairement à racheter une autre entreprise mais d’abord, posez-vous ces questions :
Est-il possible de récupérer de la matière, des composants ou même des produits que mon entreprise ou des concurrents ont mis sur le marché ?
Comment vendre des produits sans en fabriquer de nouveaux ? Comme Maty l’illustre bien avec Cresus.
Comment rester propriétaire des produits que je mets à disposition de mes clients de façon à m’assurer mon approvisionnement futur ?
Ces questions vont vous amener à des options souvent ambitieuses, peut-être parfois coûteuses à court terme mais il en va de la pérennité de votre entreprise. Plus votre capacité à anticiper vos risques clés et à les retourner en opportunités est activée vite, plus vos risques de pertes sont réduits et plus vos gains à venir seront élevés. On reviendra dans d’autres lettres sur les nécessaires modifications de business models.
Vous pouvez transmettre cette lettre à un collègue, il vous remerciera sûrement, en tous cas, moi je vous remercie ;-)
Pour améliorer votre adaptabilité…
Identifier vos matières ou flux clés
De cette liste, faire un état des lieux des capacités d’approvisionnement à venir.
Si cet état des lieux est plutôt négatif, questionner les alternatives possibles en impliquant vos fournisseurs.
Si là encore, les alternatives à ces flux clés sont insatisfaisantes, voir si des alternatives de business models ne devraient pas être testées.
Si vous souhaitez aller plus loin dans votre entreprise, faites votre Déclic Collectif, toute l’équipe Circulab sera ravie de vous y aider.
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